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NOS VOYAGES
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14 et 15 septembre 2002
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MARGAUX
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15 participants : Bully et Daniel Berger, Marie
Boutaud et Robert Tixier-Guichard, Martine et Bernard Collet, Marie
et Philippe Gerhardt, Léonidas Kanellos, Ewelina et Bruno Revault,
Lincoln Siliakus, Pierre Wagniart, Agnès Zonabend et Frédéric Maduraud. |
SAMEDI 14 SEPTEMBRE 2002
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HAUT-BRETON LARIGAUDIÈRE, BELLE-VUE, DURFORT-VIVENS, PALMER, GUITTOT
FELLONNEAU
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Château Haut Breton Larigaudière, AOC
Margaux, Cru Bourgeois, à Soussans
Le fidèle autocar Perroy nous attend à la gare Saint-Jean,
avec Abel, le même chauffeur que pour le tour à Pessac-Léognan en
mai 2001. Route des châteaux jusqu'à Soussans, là où nous accueille
Dominique Faure, maître de chai, visage de torero, et oenologue de
la maison belge de Schepper-De Mour, propriétaire de Haut Breton depuis
40 ans (et aussi de Tour Baladoz à St-Emilion). Ils ont réhabilité,
replanté (63 % cabernet sauvignon, 31% merlot, 4% petit verdot, 2%
cabernet franc) et remembré les 15 ha répartis sur Soussans et Arsac
(1). Cette année 2002, D. Faure envisage
de moins 20 à moins 30 % en quantité : 6-8 grappes/pied contre 10-12
habituellement, soit 45 hl/ha en moyenne (maximum autorisé à Margaux
58 hl/ ha), sans trop s'aventurer sur la question de la qualité. Vendanges
prévues à partir du 28/9.
- Dégustation : dans l'ordre: Le Créateur 2000, cuvée "de garage"
sortie pour la 1ère fois l'année dernière (80% CS, rendement : 25
hl/ha) : concentré agréablement, déjà formé, sans doute cher (53 e
ttc/b); Haut Breton Larigaudière 1998, à 80% CS : est-ce cette proportion
qui lui trace une médiane persistante d'acidité ? Bouquet équilibré
et modeste; prix assez élevé pour un "petit" Margaux : 22,87 e ttc/b;
et Tayet 2000, Bordeaux Supérieur (60% merlot, 40% CS, 1 an de barrique),
à la fois souple et vif; bon rapport P/Q (5,70 e ttc/b).
Château Belle-Vue, AOC Haut-Médoc, Cru Bourgeois, à Macau
C'est à proximité de Giscours mais pas si facile à trouver. Pas très
connu non plus. Car il faut le temps de s'imposer dans le Médoc; or
ce n'est qu'en 1996 que Belle-Vue (9,73 ha) s'est désannexé de Gironville
(10,14 ha), ancien grand domaine de 35 ha de vignes replanté ensuite
en pins et sauvé il y a 15 ans par les frères Mercier (pépiniéristes
viticoles vendéens), associés à l'agronome-oenologue et agent commercial
en tonnellerie (Vicard, Lafitte) : Rémy Fouin. C'est lui qui nous
reçoit. Sa devise : je cultive la vigne et la différence. Tout
avec lui sent l'original, l'innovant, l'audacieux. Par exemple, la
proportion inhabituelle de petit verdot (15 à 20%), cépage difficile
habituellement assemblé pour les notes épicées; et de carmenère (8%),
- en désuétude à Bordeaux depuis le phylloxéra mais courant au Chili
-, pour apporter un soupçon de fumé au futur millésime 2003. La culture
raisonnée ? "Pas de "biodynamie pour la biodynamie" mais des compromis
différents selon l'année : en 2000 par exemple on n'a rien mis du
tout". Le bois des barriques : du chêne, mais de Hongrie, qui
donne un "goût sucré" (toutes proportions gardées). Macération très
longue, 6-8 semaines. Vieillissement : la dégustation fait loi et
le séjour en fûts pourra varier de 14 à 20 mois. Quant au conditionnement,
la bouteille à silhouette cônique est logée dans une caisse type Bourgogne.
Enfin, rapport P/Q en pointe : le 2001 est à env. 13 e ttc/b en primeurs.
NB : les associés ont acquis à Macau 5 ha en appellation Bordeaux,
Château Bollaire. À suivre.
Rémy Fouin est un homme compétent, sympathique et direct, dégageant
une solidité, une liberté et un optimisme qui s'expriment dans son
vin. Il emporte ses bouteilles pour nous les offrir en déjeunant à
La Grange, le long de la Gironde, à Parempuyre.
- Dégustation : à Belle-Vue, 2000 (bouteille) beau et musclé;
2001 (barrique) frais et long. Au restaurant : 1998 (***) sur de la
charcuterie et des champignons : belle souplesse, des tannins arrondis;
un vin épanoui, bien minéral, puissant. 1999 (***1/2) sur du boeuf
grillé : plus de potentiel encore que le 1998; doux et puissant à
la fois; du gras, de l'épice, de l'ampleur et de la persistance. Un
vrai cadeau. Nous inscrivons Belle-Vue est sur la liste des favoris.
Château Durfort-Vivens, Margaux 2ème Cru Classé, à Margaux
Le premier des châteaux achetés par le propriétaire de Brane-Cantenac,
le légendaire Lucien Lurton. C'était en 1961 et le vendeur était Pierre
Ginestet alors célèbre propriétaire de Château Margaux, entre autres.
L. Lurton en a ensuite acquis 8 autres, pour les léguer à chacun de
ses 10 enfants l'un après l'autre, dont en 1995, Durfort-Vivens au
7éme d'entre eux, Gonzague, qui nous accueille. Son temps de président
du syndicat viticole de Margaux est compté : nous avons juste une
heure. Tout ici est neuf, les bâtiments sont restaurés - alliance
élégante de matériaux traditionnels (bois) et industriels; cuvier
équipé de 10 cuves en ciment, jugé supérieur à l'inox qui "encaisse
moins bien les chocs thermiques" (d'où perte de matière, - anthocyane
et tannin); chai muni de capteurs qui commandent l'aspiration d'air
naturel (remplace l'air conditionné); 8 cuves en bois, 6 en inox et
600 barriques neuves à chaque vendange. Tout cet équipement n'est
là que pour "contribuer à exprimer le terroir" indique G. Lurton
avec modestie. Il rappelle que la qualité "provient de l'équilibre
bien plus que de la puissance". Et ajoute : "on dit "plus
le vin est tannique, mieux il vieillit", mais ce n'est pas vrai. La
vigne, comme un autre fruit, perd du goût quand elle est trop mûre.
En surmaturité, le dessèchement est plus rapide. Il nous emmène
ensuite dans la fameuse salle du 1er étage qui ouvre à 180° sur les
vignes jusqu'à Château Margaux et la Gironde, où sont ses parcelles,
morcelées, comme le sont toutes celles du vignoble margalais.
- Dégustation : le 1998 en 2 ème vin ("Segond de Durfort")
venant de vignes jeunes (dont 30% M) : beau produit, fin, assez végétal;
le 1996 en 1er vin décanté (60% CS, 15% CF, 15 % M) : vrai "style
Margaux", profond, noble, lisse; le 2001 : peu d'impressions encore
si ce n'est celle de la filiation avec ses aînés. Pourcentage de CS
le plus élevé de Margaux; encore discret, un peu distant.
- Prix : 2001 à 21,10 e ttc/b en primeurs
c/o L. Lurton & Fils, tél: 05 5783 1010.
Château Palmer, Margaux 3ème Cru Classé, à Cantenac
Soleil éclatant sur façade XIX ème néo-Renaissance du château encadré
de tourelles pointues aux quatre angles. La sculpturale Céline chaloupe
à travers les anciennes maisons de vigneron et nous guide entre les
marronniers jusqu'au chai-cathédrale de 33 cuves. Elle nous y explique
la tactique du traitement parcellaire mise en place par la famille
Chardon, régisseurs de père en fils depuis 1938; et du micro-assemblage
de chacun des 43 lots composant le vignoble. Le Palmer vieillit de
16 à 21 mois en barriques (1/3 neuves) et peut/doit attendre une ou
deux décennies ans avant d'être débouché. Une forte proportion de
merlot (46 % en 2001) lui confère un velouté exceptionnel. Et son
bouquet raffiné le distingue des autres Margaux dont le terroir s'exprime
plus durement au début. Pour améliorer encore la superbe qualité du
Palmer, - que certains estiment être l'un des plus grands vins du
monde (il y a des "clubs Palmer" au Japon), équivalant ou dépassant
Château Margaux -, on a créé un 2 ème vin, "Alter Ego" (ex "Réserve
du Général" jusqu'en 1997) dont la quantité peut atteindre 40% de
la production totale.
- Dégustation : 2001 (****), tout est là mais "rien de trop".
Fleur (violette), fruits encore frais (mûre, pruneau), touche de boisé
juste perceptible et longue finale tout en fraîcheur. Un baiser. Saveur,
onctuosité et finesse vont se développer à coup sûr pendant 20 ans
(2020 ? On sera là, rien que pour goûter, promis !). Suave, ample,
mûr, Palmer transcende l'appellation Margaux, - comme Haut-Brion transcende
"Pessac-Léognan" ou Pétrus "Pomerol", - emblème du Bordeaux classique,
racé, sans brillance superflue, équilibré à la perfection.
- Prix : 103 e ttc/b 2001 en primeurs (!), chez Millésima.
Guittot Fellonneau, AOC Margaux, Cru Artisan, à Macau
Le ferme-auberge des époux Constantin est juste derrière le château
Cantemerle. Nous voilà réunis autour de la table, si on peut dire
puisque dressée en T, pour un "souper léger" : garbure et rillettes
de canard, esturgeon fandango et alose aux aromates, confit
de canard, magret grillé aux sarments, fromages et pâtisseries...
Guy Constantin nous apporte son Guittot Fellonneau, d'abord le 2001,
puis le 1998, le 1997, et descend à la cave chercher des 1996 et 1995.
Il faut bien boire aussi du vin d'"en-bas" (8 bouteilles à 16). Comme
le sien, il y aurait à Margaux une quarantaine de crus artisans (moins
de 4 ha) produisant un peu plus de 10% de l'appellation, peu connus,
mal promus.
Le Guittot Fellonneau vaut entre 9 et 10 e ttc/b (en direct à la ferme,
tél: 05 5788 4781).
Dans la splendeur de la nuit médocaine, l'autocar glisse jusqu'à nos
chambres d'hôtes, qui chez dame Perry dans les bois de Castelnau,
qui chez dame Rousseau et sa fille dans ceux de Parempuyre.
(1) L'appellation Margaux
(1 420 ha) s'étend sur cinq communes : Arsac, Cantenac, Labarde, Margaux
et Soussans. |
DIMANCHE 15 SEPTEMBRE 2002
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CHÂTEAU LASCOMBES, DOMAINE DE L'ILE MARGAUX, CHÂTEAU KIRWAN, CHÂTEAU
SAINT-AHON
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Château Lascombes, 2ème Cru Classé, à
Margaux
Le vignoble s'étend sur 84 ha et produit 340 000 b/an, dont 90 000
de 2ème vin ("Chevalier de L"). Le domaine n'a pas vraiment de tradition
"française", ayant appartenu entre autres au négociant écossais Johnston,
ou américain, Alexis Lichine, et au brasseur anglais Bass Charrington.
Aujourd'hui, Lascombes est la propriété de Colony Capital, fonds de
placements californien. Qui dit placement entendra investissement.
Les projets fourmillent : un centre de dégustation à côté du château,
dans la chartreuse de Ségonnes; des tables de tri vibrantes dernier
cri; et la modification de l'encépagement, la proportion de merlot
passant de 50 à 55 % et celle du cabernet sauvignon de 45 à 40 %.
L'existant est déjà nec plus ultra : 32 cuves neuves de 140
hl, dont 8 en chêne et le reste en inox; chai à barriques équipé de
1000 fûts, renouvelés à 80% (7 fournisseurs); macération à froid et
installations de vinification aux normes ISO. Et depuis 2001, la réduction
des rendements de 45 à 29 hl/ha.
- Dégustation : 1996, corsé, toasté, encore un petit peu vert;
manque sans doute de consistance; finale ronde mais un peu courte;
attendre le grand frisson vers 2008.
- Prix : 42 e ttc/b 2001 primeurs, chez Jean Merlaut (Tél 05
5797 7735).
Château Desmirail, 3ème Cru Classé, à Cantenac
Lucien Lurton, encore lui, a fait renaître ici un domaine qui n'avait
plus d'existence : propriété de la famille Mendelssohn confisquée
comme bien allemand à la 1 ère guerre, puis dilapidée avant la 2 ème
par le Français Michel, bout par bout. Les 30 ha, dont 2/3 classés
Margaux, ont été rachetés lot après lot par L. Lurton entre 1961 et
1981, avant de faire don du vignoble ainsi réassemblé (70% CS, 25%
M, 5% CF) à son fils Louis en 1992. L'héritier, avocat, continue sur
la lancée. Il va faire passer la densité de 6 800 à 8 000 pieds/ha
(1,30 m d'espacement), pour un rendement maximum de 45 hl/ha. Et il
voudrait bien faire entrer son étiquette à L'Union des Grands Crus.
250 personnes pour les 3 propriétés Lurton (Brane-Cantenac, Durfort-Vivens,
Desmirail) se préparent à cueillir les merlots à la main, "à la
limite du pourri" précise Pierre Lafeuillade, chef de culture
ici depuis 15 ans; et les cabernets sauvignons à la machine (il y
en a trois, réglées pour la saison à l'identique, 8 ha/machine/jour)
avant de les trier manuellement, et en s'y reprenant à deux fois.
Le "château" (ex Port-Aubin) est en fait constitué de plusieurs bâtiments
d'exploitation. Sous une superbe charpente d'origine, tout ici aussi
est neuf, les chais carrelés, les 10 cuves en inox auxquelles sont
destinés les cabernets sauvignons, et celles en bois pour les meilleurs
merlots.
- Dégustation : 1989 (***1/2); belle charpente; encore bien
puissant; savoureux; à boire.
1999 (***1/2); attaque forte; fruité et charpenté; bouquet ouvert;
attendre une dizaine d'années.
L'étiquette du 2 ème vin, l'ex "Château Fontarney", a été modifiée
en "Initial de D".
- Prix : 16,75 e ttc/b 2001 en primeurs chez L. Lurton & Fils
(tél: 05 5783 1010).
Domaine de l'Ile Margaux, AOC Bordeaux Supérieur, à Margaux
En suivant l'allée de peupliers le long de Château Margaux, on arrive
à un petit ponton où nous attendent Lionel de Mecquenem et sa femme
pour traverser le chenal dans leur barge. Eau beige, vaseuse; cabane
de carrelets sur pilotis sur la rive; paysage un peu bayou.
La table est installée au soleil devant leur villa et nous partageons
pâtés, tartes et fruits préparés hier par les époux Constantin, avec
les bouteilles de 2000 que nous offrent nos hôtes : le vin de l'ile
est rouge foncé, corpulent, marqué par les tannins et le goût de mûri.
Il en est produit 100 000 b/an, en totalité exportées au Québec.
Le vignoble (14 ha, pourrait être agrandi de 5 ha à endiguer) recouvre
toute l'ile, séparé en deux par une allée rectiligne. L'encépagement
(60 % M, 20 % CS, 10 % PV, 5 % malbec et 5 % cabernet franc) "est
le même qu'en face" dit avec malice notre viticulteur îlien. Avec
une différence de taille : le terrain siliceux ne produit qu'un vin
de palu (alluvion). Avantages : grâce aux inondations, la vigne ici
n'a pas été touchée par le phylloxéra; un microclimat la protège des
gelées; et le limon frais lui sert d'engrais.
- Prix : environ 9 e ttc/b, en direct au domaine.
Demander Lionel de Mecquenem de notre part; tél. 05 5788 3519.
Château Kirwan, 3ème Cru Classé, à Cantenac
Allongé dans un transat à l'ombre d'une rangée d'arbres bordant la
longue pelouse, Jean-Henri Schÿller, 7 ème génération de la famille,
propriétaire après 1926 de Kirwan - nom de l'acquéreur en 1760, un
des illustres Irlandais venus à l'époque coloniser le vignoble bordelais.
Monsieur Jean-Henri a vécu ici enfant et a promis à son père de ressusciter
le domaine endommagé par la guerre. Il est aujourd'hui retiré (mais
garde un oeil sur l'assemblage) avec son épouse Christine (née Krug),
habitant leur château (fait devenu rare à Bordeaux). C'est un noble
édifice, style chartreuse XVIII ème, haussé d'un étage au XIX ème,
splendidement isolé au milieu d'un vignoble de 35 ha sur le plateau
de Cantenac ondulant au loin. Les vignes ont été effeuillées, palissées,
égrappées, et les précieuses baies foncées mûrissent au soleil. Sous
le terrain bien drainé par un réseau de fins ruisselets bruissant
à nos pieds, les racines cherchent sucs et substances : l'alchimie
s'opère entre la plante et le sol, un puzzle de graves, de sables
et d'argiles.
Pour tenir une réputation de "plus puissant des Margaux", la sélection
est sévère : sur les 150 000 bouteilles produites en 1998, la moitié
est passée en 2 ème vin ("Charmes de K", assemblé en milieu de vieillissement);
et en 1999, seules 35 000 b ont été retenues en 1er vin. 2000 est
une année exceptionnelle, "une bombe ! Parker lui a mis 93-95 et
veut le regoûter" assure, passionnée, la jeune Marielle Didry.
Et 2002 ? "Une année difficile. Ce sera un millésime technique",
pense-t-elle :"ceux qui gagneront sont ceux qui sauront prendre
les bonnes décisions". La première a été de vendanger le plus
tard possible, entre le 4 et le 10 octobre. Château Margaux a fait
de même.
- Dégustation : Le 1998 en 1er vin (***1/2 ), aéré depuis 90'
: foncé, très concentré mais raisonnablement tannique. J-H Schÿller
a expliqué : "l'attaque est vive, puis elle gonfle et s'épanouit
dans la cavité des papilles et achève sa course en longueur, en un
fuseau de saveurs complexes, en ovale, comme un ballon de rugby".
Très beau vin. Attendre encore 10 ans pour bénéficier de ses caresses.
- Prix : le 2000 1er vin vaut 62 e ttc/b. Le 2 ème vin est
à 22 e : une affaire !
On peut le commander seulement au château (tél : 05 5788 7142, fax
7762).
Le 1er vin 2001 est à 24 e en primeur chez H. Cuvelier (tél 05 5777
1150), bon rapport P/Q.
Château Saint-Ahon, AOC Haut-Médoc, Cru Bourgeois, à Caychac
Abel nous balade par le château d'Arsac restauré et dont l'ancien
chai est peint en bleu outremer, couleur bouillie bordelaise. Puis
tourne et retourne son volant sur la tortueuse petite route longeant
le fleuve, pour nous faire voir les châteaux Barreyre et Plaisance.
On tentera bien d'apercevoir Clément-Pichon derrière ses hauts
arbres, en vain.
Nous voilà à Saint-Ahon, l'un des premiers châteaux juste à la sortie
nord de Bordeaux (XIV ème, restauré fin XIX ème "dans le style François
1er", couleur brique), le long de la jalle (petit affluent de la Garonne
ou de la Gironde) de Blanquefort, - délimitant l'appellation Haut-Médoc.
C'était une propriété du président de la société hippique bordelaise,
et il y entraînait ses chevaux. Une vingtaine s'ébattent toujours
à proximité des vignes, qui n'occupent que 31 ha, d'un seul tenant,
sur les 50 au total achetés en 1985 par le Comte Bernard de Colbert,
- propriétaire du Château de Brézé et des Caves de Grenelle en saumurois.
Le régisseur, Joël Pradeau, nous montre d'ailleurs une machine à tri
vibrant de marque Maïsa fabriquée à Saumur, avant de nous emmener
dans le chai à barriques (500), inscription du blason éclairée sur
le mur du fond, façon Cru Classé.
- Production : 110 000 b/an de 1er vin, et 70 000 de 2 ème
("Colbert-Cannet").
- Dégustation : 2001, sorti de barrique; sur le fruit, acidité
"de principe" et caractère tannique qui caractérisent ce vin joliment
rustique. 1996 (**1/2 ; épuisé) : ceux qui le connaissent l'ont trouvé,
sur place, toujours vivace et frais; sa vigueur de jeunesse s'est
fondue en douceur.
- Prix : rapport P/Q correct. 1994 à 9,50 e ttc/b (à boire);
1997 à 8 e (à boire); 1999 à 8,80 e (à garder); 2000 à 8,54 e (à garder).
- Commandes : en direct au château (tél: 05 5635 0645, fax:
05 5635 8716). |
À RETENIR
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Maturité
Nous avons entendu bien des choses sur le degré de maturité souhaitable
à la récolte, les uns partisans du sur-mûr (Desmirail, Kirwan),
ou du macéré (Belle-Vue); les autres du mûrissement maîtrisé (macération
à froid à Lascombes), ou de la préservation du fruit (Durfort Vivens,
- selon G. Lurton, le dessèchement est plus rapide lorsque le raisin
est cueilli très mûr). Non dénuées de subjectivité, ces considérations
sont sans doute marquées par le souci partagé par tous de contrebattre
l'insuffisance d'ensoleillement cette année, tout au moins jusqu'aux
derniers 15 jours avant les vendanges.
Le goût du bois
Dans chaque propriété on nous a sorti un couplet bois, allant de
la modération (la barrique doit n'être qu'un révélateur des arômes)
jusqu'au retour à la neutralité (en finir avec la surexpression
et la "tisane de chêne"). On a senti une fronde contre le goût "oaky"
préparé pour le palais américain. Mais la recherche constante de
qualité des barriques montre que le boisé fait maintenant partie
de la palette aromatique de base.
Vieillissement
On a eu du mal à savoir de nos différents interlocuteurs si le
goût du vin arrivé à sa plénitude bénéficiera de toutes les améliorations
techniques qui lui profitent dès ses premières années, - lui donnant
une tournure presque aussitôt acceptable à sa naissance. Idéalement,
le vin serait buvable dès embouteillage sans que sa qualité n'en
pâtisse une fois arrivé à l'âge mûr. Mais on n'en sait rien, car
les vinificateurs qui font le vin d'aujourd'hui semblent ne pas
boire celui qui a 15 ou 20 ans comme "vin à maturité", mais comme
"vieux". Nuance.
Palmer
À quoi tient la perfection des vins de Palmer ? À un bon drainage
dû aux pentes du terrain légèrement bombé ("croupes") qui écoulent
l'eau naturellement : pas d'eau immobile, "poison de la vigne".
Aux galets larges, jusqu'à 15 cm, de son terroir de graves dites
"Güntziennes" (quartz blanc, quartzite marbré de noir, cailloux
rouges, roses et à stries vertes), qui emmagasinent le mieux la
chaleur, jour et nuit, entretiennent l'acidité des sous-sols et
en maintiennent la pauvreté, limitant naturellement le développement
de la plante. Au climat tempéré par la Gironde toute proche : étés
et automnes ensoleillés et pas d'hivers "qui tuent". Enfin, aux
hommes de l'art qui ont toujours pris ici les risques indispensables
pour atteindre à la qualité et à la continuité du management du
domaine.
Lire : "Château Palmer, noblesse oblige" par René Pijassou,
Editions Stock (1997).
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